Avec son nouveau titre « J’ai donné », Korzaak, que l’on a découvert grâce au média musical This is Riviera, poursuit un chemin artistique singulier, entre mélancolie assumée et élégance émotionnelle. Le rappeur ne se contente pas de raconter son vécu, il le met en scène avec une pudeur à la fois touchante et puissante. Dans un paysage musical souvent dominé par l’ego et l’excès, il choisit la sincérité. Et cela fait toute la différence.
Dès les premières mesures de « J’ai donné », le ton est donné. La production, sobre et atmosphérique, laisse la place aux mots. Pas de surenchère sonore, pas d’effets inutiles, juste une boucle mélodique douce, un beat discret, et une voix posée qui délivre ses vérités. Korzaak parle de déceptions, d’efforts non reconnus, de blessures invisibles. Il évoque les relations humaines sans filtre, sans masque, avec une authenticité rare. Ce n’est pas un morceau qui cherche à plaire ou à séduire : c’est une confession mise en musique. Une mise à nu pudique, presque murmurée, où chaque mot semble porter le poids d’une expérience intime. On sent une fatigue émotionnelle, mais aussi une forme de résilience silencieuse.
Le clip, tout aussi minimaliste que le morceau, accompagne parfaitement le propos. Plans serrés, lumière tamisée, regard dans le vide, tout est fait pour recentrer l’attention sur le message. Pas de mise en scène tape-à-l’œil, pas de fiction fabriquée. Korzaak se montre tel qu’il est, vulnérable et digne à la fois. C’est cette vérité-là qui accroche, qui reste, qui marque.
Une élégance nouvelle dans le rap français
Au-delà du titre « J’ai donné », ce que propose Korzaak s’inscrit dans une tendance plus large du rap français : celle d’un art qui assume aujourd’hui sa complexité. Longtemps associé à la rue, au rejet et à la colère, le rap français s’offre désormais une seconde peau, plus élégante, plus nuancée. Des artistes comme SCH, Damso ou encore Korzaak parviennent à conserver l’intensité du vécu tout en l’enrobant d’une esthétique soignée, d’un ton presque littéraire par moments.
Là où le rap a longtemps été perçu comme brut, parfois agressif, une nouvelle génération propose une version plus posée, plus classe. Il ne s’agit pas de renier les racines — elles sont toujours là, mais de leur donner une autre dimension. On parle d’hommes blessés mais fiers, de failles assumées, de sentiments puissants mais maîtrisés. Le tout dans un français riche, parfois poétique, souvent introspectif.
Korzaak s’inscrit parfaitement dans cette mouvance. Il ne fait pas du rap pour jouer un rôle, mais pour transmettre. Il n’y a chez lui ni excès de style, ni posture de dur à cuire. Juste un besoin d’expression brute, canalisée par une esthétique sobre et travaillée. Ce choix le distingue, le rend à la fois accessible et mystérieux. On sent chez lui une volonté de rester fidèle à ce qu’il est, loin des artifices ou des effets de mode. Il parle peu, mais chaque mot semble pesé, pensé, porté par une sincérité rare. Cela donne à ses morceaux une densité émotionnelle particulière, presque cinématographique. Chez Korzaak, chaque silence compte autant que chaque phrase. Et c’est peut-être là, dans cette pudeur assumée, que réside sa plus grande force.
Une voix à suivre
Avec « J’ai donné », Korzaak confirme qu’il fait partie de ces artistes à suivre de près. Il ne crie pas, il parle. Il ne provoque pas, il confie. Et dans cette retenue, il crée de l’émotion. C’est précisément ce qui manque à tant d’autres : cette capacité à toucher sans crier, à émouvoir sans effets.
Le rap français évolue, et il le fait avec style. Korzaak en est l’une des plus belles preuves. Un artiste qui donne, justement, avec le cœur. Et qui mérite en retour toute notre attention.